Scenario pour film familliale

D'accord avec Bertrand! Quand je suivais mes cours le prof de montage nous obligeait à d'abord monter sans mettre le son pour voir si cela "coulait"...C'est vrai que c'est édifiant! Un autre point aussi qu'il répétait sans cesse: vous ne faites pas un jeu vidéo montez en cut! Je trouve, avec le recul, que cet enseignement était très bon.Cela ne m'empêche pas d'utiliser de temps en temps l'un ou l'autre effet... Mais, aah!, un beau montage en cut... Quant à l'émotion, c'est essentiel qu'elle soit présente pour faire adhérer le spectateur au récit.

 

Le montage familial et ses problèmes qui sont les mêmes que pour tout montage sauf que.......il n'y a pas de sujet, sinon le temps qui passe, les enfants qui grandissent, les parents qui vieillissent et les souvenirs qui s'étiolent.

En préambule, je voudrais faire cette remarque qui me parait très importante :

NE JAMAIS ACCORDER TROP D IMPORTANCE AUX AVIS DES EXTERIEURS

pour une raison très simple :

ILS NE SE RENDENT PAS COMPTE DES SOMMES D ARGENT DELIRANTES QUI SONT DEPENSEES POUR LA MOYENNE DES PRODUCTION PROFESSIONNELLES QU ILS VOIENT

J'ai été confronté au problème en faisant, pour un ami d'ami, un petit film de mariage de trois heures "tourné monté" (à la gachette disent les frères Dardenne qui ont pratiqué le genre au début des années 70 au début de la vidéo), très honorable - je l'ai regardé deux fois sans m'ennuyer, qui ne contenait pas de grands moments certes (mais le mariage n'en contenait pas non plus), mais qui ne ratait rien. Et bien le marié n'en a pas été vraiment content de ce que j'ai pu en comprendre. Il s'imaginait que pour le défraiement qu'il "m'offrait" (le cout du train et la nuit d'hotel), j'allais en deux jours lui monter un petit chef d'oeuvre synthétique et drôle (je passe sur l'aspect "qui en plus convienne à ses gouts cinématographiques").

Les gens s'imaginent de plus en plus qu'avec les ordinateurs on peut monter en appuyant sur un bouton, les gens ne connaissent pas le prix des films qu'ils vont voir, et les gens pensent aussi, c'est cela le plus grave, qu'il existe une forme filmique standard dans laquelle il est facile de se couler parce que la télé, d'un coté, le cinéma, de l'autre leur fournissent deux univers uniformisés autour d'une forme narrative standard et d'une forme documentative standard, et que ces deux formes étant standards, et bien elles ne demandent aucun effort pour être "impulsées" dans les films (analogie incorrecte entre langue naturelle et langage cinématographique).


Par rapport au montage long et un peu lent que l'on a tendance à privilégier en raison de "l'amour un peu irationnel" que l'on porte à ses images, il ne faut pas non plus le jeter à la poubelle sans autre forme de procès. Ce n'est pas parce que le cinéma et la télé aujourd'hui ont décidé de se fixer sur des montages ultra rapide que c'est la seule forme acceptable. Pour le dire autrement, les gens (extérieur, famille rapprochée ou famille semi lointaine) peuvent faire un effort pour se confronter à d'autres styles que ce qu'ils attendent inconsciemment. Ensuite si ils n'aiment pas, c'est leur problème, pas celui du "réal" qui conserve sur le style toute sa souveraineté, si ils ne sont pas content parce que c'est un style lent (je parle là d'événements familiaux communs, pas des premiers pas de ta fille que tu montres à tout le monde), et bien il n'ont qu'à se charger eux même du travail.

Last but not least, il faut aussi relativiser le contexte temporel: tel film peut te sembler long aujourd'hui, mais peut-être que dans vingt ans ses lenteurs deviendront un plaisir (et seront considérées pour ce qu'elles sont si elles sont légitimes : une meilleure attention portée aux choses) pour ceux qui auront l'occasion de le voir.

En filmant tourné monté, récemment j'ai essayé de réduire la durée de ce que je sortais, alors que je peux facilement ramener une heure mettons d'une journée entre copains à l'extérieur de Paris, j'ai essayé de réduire à une demi heure, et bien j'ai un manque quand je dérushe, il y a des trous de souvenir, je m'aperçois que c'est pas assez, que je me suis "mangé des souvenirs" sans qu'il y en ait vraiment la nécessité.


Enfin, si je devais conseiller quelque chose, avant de s'attaquer à des montages thématiques complexes avec chutes, gags, effets narratifs, etc, c'est de beaucoup pratiquer le tourné monté, qui est une excellente école pour une des choses les plus complexes et mystérieuses du cinéma : la bonne durée des plans.