le plan séquence, ringard, passé de mode ou pas ?

En discutant avec certains acteurs du monde de l'audiovisuel (institutionnel, JRI ou réal de fiction), je me rends compte que beaucoup de ces personnes ont une conception de l'image qui se rapproche de celle de la musique. A savoir, très basée sur une notion de mode. Tel effet serait daté, telle valeur de plan ringarde, bref, j'ai du mal à comprendre ce genre de regard. Je veux bien que certains artifices puissent être datés, mais en quoi un fondu enchainé est ringard si il est bien employé ? Pourquoi serait-il obligatoire d'interdire le plan séquence si il y a de la vie et que le jeu des comédiens le permet et le remplacer par une vingtaine de plans sur les mains, les regards, les sempiternels champs-contrechamps ?… bref, tout un tas d'astuces qui selon moi, sont plutôt le reflet d'une volonté de combler un vide par le montage.
Bref, le plan séquence, ringard ou pas ?

 

La mode c est l art d être tous ridicules en même temps.

 

cette séquence c'était une tuerie aldo maccione au top du rire ce gars là dans tout ces films

 

Entièrement d'accord sur le fond. L'usage d'un effet (quel qu'il soit) est justifié s'il répond à la vision de son créateur. Donc, non, le plan séquence (parmi d'autres effets) n'est évidemment pas ringard en soi. Qu'une scène fasse écho aux yeux du public (initié ou non à la technique) ou lui paraisse totalement ringarde est une autre question, forcément subjective. C'est simplement le lot de toute proposition artistique.
Mais au delà d'être pour ou contre l'avis de ces techniciens décrétant ringarde telle ou telle technique, le discours sur la mode permet de relever un phénomène (qu'on retrouve dans d'autres professions) :

D'abord, il ne faut pas nier l'existence de la mode

1. l'image est (aussi) un art : Quand une oeuvre importante apparaît, il n'est pas étonnant de voir une succession de déclinaisons, adaptations ou pures copies : bref, une mode. Ce n'est pas forcément malsain. C'est une des voies classiques d'apprentissage. Dans le meilleur des cas le copieur trouve un langage propre passant du pur mimétisme aux influences croisées et tâche laborieusement de faire émerger une vision artistique personnelle. De cette mode peuvent émerger de nouveaux artistes.
   
2. l'image est (aussi) un commerce : Le but premier (sinon unique) étant le profit, on repère ce qui "marche", ce qui "plait" pour tenter de le répéter jusqu'à épuisement du filon. C'est observable jusqu'à la caricature dans les secteurs les plus commerciaux de l'industrie cinématographique ou la publicité qui assument pleinement leur démarche marchande. D'un point de vue purement artistique, la copie peut dans ce cas avoir une influence négative :

• par leur diffusion massive cela tend à unifier les imaginaires mentaux, gommant peu à peu les spécificités culturelles entre un suédois, un français, un japonais, etc. Il ne faut pas exagérer l'efficacité (ni l'universalité) de ce gommage mais il existe.

• le caractère moutonnier de ces industries rend difficile l'émergence d'artistes atypiques parce que pressentis comme peu rentables. Jusqu'à "accident" donnant naissance à de nouveaux filons bientôt épuisés (le "found footage" étant un cas d'école).

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L'aspect intéressant, selon moi, est de constater l'usage qu'a la "mode" dans le discours de certains acteurs du secteur. Ils défendent une position assumant ouvertement un point de vue anti-commercial (de bon ton) quand souvent, implicitement, pointe une critique face à l'émergence de nouveaux acteurs perçus (de manière justifiée ou non) comme une menace.
C'est d'autant plus frappant alors que sautent des barrières technologiques qui rendaient jusqu'ici certains effets* hors de portée (économique) du débutant : comme en miroir chacun de ces effets finit par être pointé comme démodé - parce que devenu accessible à la masse. Derrière ce discours de certains professionnels, il y a aussi un soucis assez "naturel" de distinction. Et pour les plus inquiets d'entre eux, dont la légitimité professionnelle reposait moins sur leur savoir-faire que sur leur investissement (pour certains conséquent) dans des outils qui finissent par devenir peu ou prou à la portée de tous, on peut comprendre la nécessité qu'il y a à marteler cette distinction. Derrière la condamnation du "démodé", celle du débutant... du pouilleux.

* "bokeh", travellings, steadycam, etc.

PS : je me rends compte après avoir visionné l'extrait d'Aldo mon discours sur la technique est un peu à coté (j'imaginais un long plan séquence steadycam ) : mais bon, j'espère que ça reste juste sur le fond!

 

Le plan séquence nest pas ringard s'il trouve pleinement sa justification dans la narration, le montage.

Et puis il y a des trucs qui vont, qui viennent. Il y a cinq, dix ans, on ne jurait que par le steadycam (le steady junior avec les PD170), aujourd'hui on s'amuse avec l'aérien ou avec les slider pendant les itv… les full frame passent gentiment de mode, la grue dans les docs réapparait. la caméra épaule est connotée film d'auteur mais elle est omniprésente dans les émissions de téléréalité. Le ralenti survit mais il faut l'agrémenter de flares. Rien n'est vrai, rien n'est faux. on fait ce qu'on veut de toute façon. Comme Aldo.

Roger, un muscadet.

 

pour moi c'est une des séquences les plus violentes du cinéma : le plan séquence du suicide dans Caché de Haneke

 

Tiens on a le droit de poster des trucs pareils sans avertissement à présent ?

Bon sinon j'adore la double focale- split field- et tant pis si c'est ringard.

 

Pour moi le meilleur De Palma, sa maitrise technique de l'image m’impressionnera toujours je pense...
Merci d'avoir déniché ce montage très démonstratif

 

il me semble qu'on ne doit utiliser une grue, un drône, un plan séquence uniquement lorsque le scénario le demande. Perso, j'ai une grue, et des tas de potes apprentis cinéastes, ils veulent tous m'emprunter ma grue, juste histoire de jouer avec, de montrer un plan "différent" et j'ai beau leur dire:" En as tu réellement besoin?" la réponse est toujours oui, alors que dans les faits....

Dans mon film "LA FLEUR" il y a un plan-séquence (qui n'en n'est pas vraiment un) qui débute par un pano puis suit une progression d'actions différentes jouées par 7 comédiens devant une table. Là, j'avais pas le choix, et, pour corser le truc, il y a un clarinettiste qui ponctue chaque action d'un comédien par une petite musique jouée en direct ! Le résultat est convaincant (AMHA) et la séquence est fluide (c'était l'idée de ne pas arrêter une progression évolutive) mais faire un plan-séquence juste pour dire:"Vous avez vu?" je trouve ça stupide (mais moi aussi j'ai eu 17 ans...)

A force d'utiliser les drônes, les films ressemblent à des pubs, il n'y a rien d'aussi éphémère que la mode, et moi, je trouve que ça décrédibilise immédiatement l’œuvre. ça pue !

Je suis attéré quand un film commence par un plan séquence, style "suivi de voiture par un drône" (SAUF la séquence d'ouverture de SHINING ...) quel manque d'imagination !

 

Voyez «L'Arche Russe» de Sokourov (1h30 de plan-sequence) !
Ou «La Corde» d'Hitchcock, qui n'est certes pas en un seul "vrai" plan-sequence, changements de pellicule oblige (mais où l'illusion fonctionne à merveille) ...

Chacun fait ce qu'il veut et, n'est ringard que ce que l'on trouve (personnellement) ringard je dirais (au fond on n'a qu'une vie) !

 

Le plan-séquence fut probablement décrété "ringard" par des petits frustrés ou des grands affolés.
Des réformistes mainstream trop épris de leur verbe et de leur gueule pour perdre leur temps à s'exercer sur le tas !
C'est tellement plus simple de tourner en ridicule une maîtrise technique que l'on jalouse..
Plutôt que de considérer humblement ses limites et de consentir à un réel effort pour les repousser.
Quoique... Se rétamer à l'essai, ça la fout mal devant les talonneuses de l'UFR psycho.

Nous sommes deux.

 

De quel type de Found Footage parles-tu ?
Des vrais, des faux, des faux-vrais, des pas tellement vrais sans être complètement faux... ?
Des 1/2 Found-1/2 Fiction, des 1/2 Docu'... ?
De Grave Encounters à Poughkeepsie Tapes en passant par Les Documents Interdits..
Y'a de quoi gratter..